Le sujet a été débattu à de très nombreuses reprises ces derniers temps, à la fois aux Etats-Unis et en Europe. Les médias sociaux ont apportés des changements radicaux dans les relations entre la marque et ses consommateurs. Fort logiquement, ces changement commencent à avoir un impact sur les relations entre les marques et leurs agences. Difficile encore d’avoir une idée précise de ces changements, mais certains auteurs apportent des éléments intéressants au débat.
Les annonceurs vont devoir mouiller leur chemise. A l’ère de la publicité, et du marketing d’interruption, le point clé était le concept de communication, qui devait retenir l’attention. D’où l’intérêt que les marques avaient à faire appel à des agences, qui sont des machines à créer des concepts de communication. Mais avec l’arrivée des médias sociaux, le plus important se situe du côté de la marque : connaissance empirique de la cible, connaissance du produit, support nécessitant moins de compétences techniques différentes (si on se focalise sur le dialogue)… Les marques ne pourront bien entendu pas gérer seules leurs stratégies de conversation, mais les agences vont devoir évoluer. Quelques pistes :
Les agences « social media » seront avalées par les grosses agences de marketing et publicité
Aziz Adad a écrit un article très intéressant soutenant cette théorie.
A mon avis les agences social media, surtout en France, ne grandiront pas assez vite pour s’imposer de façon durable. Les agences traditionnelles intègreront petit à petit les compétences en médias sociaux et conversation, et les annonceurs n’iront pas chercher plus loin, et continueront à travailler avec leur agence traditionnelle. Reste de gros challenges pour ces agences classiques, en termes de compétences, d’état d’esprit, d’organisation…
Les marques travaillent avec trop d’agences différentes
C’est la théorie exposée par Valeria Maltoni sur son blog Conversation Agent. Avec la multiplication des supports et le léger déclin de médias comme la TV, la radio, les marques ont commencé à travailler avec une multitude d’agences différentes (publicité, marketing direct, création, digital, médias sociaux, RP et eRP, événementiel…). Le problème? A l’époque de la conversation, les marques ont besoin de beaucoup plus de cohérence et de réactivité dans leurs prises de parole et leur écoute. Dans cette optique, les marques devraient plutôt limiter le nombre des agences avec lesquelles elles travaillent.
Les idées et l’intégration ne font pas bon ménage
Joseph Jaffe, directeur de l’agence crayon, qui travaille en particulier pour Coca Cola pense que dans le futur, les agences vont se diviser en deux : il y aura les agences créatives, responsables de trouver des idées pour aider la marque à se connecter avec ses consommateurs, et les agences d’intégration, qui réaliseront ces idées et auront en charge le planning stratégique. Il a cette conviction depuis que Coca Cola a décidé de séparer son budget stratégique entre une agence de création et une agence d’intégration.
Les agences vont devenir des créatrices de plateformes
Dans un article extrêmement intéressant, Bud Caddell, digital strategist chez Undercurrent, amène une idée complètement nouvelle. Et si les agences devenaient plutôt des créatrices de plateforme? Au lieu de conseiller les marques dans leur utilisation de Facebook, si elles créaient plutôt le prochain Facebook? Au lieu de conseiller une marque à communiquer au mieux dans GQ, si elles créaient plutôt le prochain GQ? Même si je pense que ça semble un peu complexe au niveau business, il y a un argument très fort en faveur de cette hypothèse : qui mieux que le créateur d’une plateforme peut conseiller la marque à son utilisation? Les supports devenant de plus en plus variés et de plus en plus complexes, les agences auront du mal à tous les maîtriser, en particulier car ils n’auront jamais accès à l’ensemble des analytics.
Une petite conclusion personnelle
La vérité pourrait bien se situer quelque part entre toutes ces hypothèses.
- Il est fort probable que les marques intègrent petit à petit les compétences relatives aux médias sociaux en interne (et pas seulement avec des community manager, comme c’est le cas actuellement). Cela leur permettra de profiter de leur expertise sur les produits, les consommateurs, le secteur… Elles bénéficieront également d’une grande cohérence et d’une forte réactivité dans leurs prises de paroles et leur stratégie d’écoute.
- Elles auront toujours besoin de prestataires extérieurs, pour deux tâches : apporter un regard neuf et des idées sur leur marketing et pour l’intégration des grandes campagnes transmedia. Dans ces deux cas, ce sera à la fois du conseil et de l’exécution.
- Pour le conseil concernant les sujets complexes (stratégiques et organisationnels) dans le domaine des médias sociaux, je mettrais bien quelques dollars sur leur intégration dans les grands cabinets de conseil en stratégie, comme le Boston Consulting Group, ou McKinsey par exemple.
- Et finalement, je pense que l’idée de Bud Caddell possède une part de vérité également. Mais pourquoi pas dans le sens inverse : il est fort possible que les plateformes Internet développent des activité de conseil (basé sur les analytics), pour assister les marques dans leur utilisation de la plateforme.
Et comme le dis Joseph Jaff, ça ne coûte pas grand chose de faire des prédictions : si je me plante, personne ne viendra déterrer le cadavre de cet article, et si j’ai raison, je pourrai me la raconter pendant des mois.
Et surtout, n’hésitez pas à laisser votre avis en commentaire, je pense que chaque expérience, chaque point de vue est important dans ce débat !